Publié le 19 septembre 2025
Beñat Molimos est le coprésident d’Euskal Herriko Laborantza Ganbara, une chambre d’agriculture qui a choisi de travailler avec les élus et la société civile du Pays basque. Un engagement de longue date qui a fait de l’association un acteur incontournable du territoire.
Eleveur de brebis laitières au Pays basque, Beñat Molimos est un acteur majeur de l’agriculture paysanne. Coprésident de l’association Euskal Herriko Laborantza Ganbara (EHLG) depuis 2015, il se bat pour préserver un modèle agricole respectueux des spécificités locales, loin des logiques productivistes. Depuis 1994, son parcours militant s’inscrit dans un mouvement de résistance face à l’agro-industrie.
Après avoir repris l’exploitation familiale en 1994, Beñat rejoint Euskal Herriko Laborarien Batasuna (ELB), branche locale de la Confédération paysanne. Le but: défendre une agriculture paysanne face à la FNSEA, majoritaire dans la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques, département qui, depuis la Révolution, fusionne le Béarn et le Pays basque. C’est dans ce cadre qu’émerge une idée audacieuse, que Beñat résume :
« En 2001, les élections à la chambre d’agriculture révèlent qu’au Pays basque ELB est majoritaire ; en revanche, elle est minoritaire à l’échelle départementale. Nos idées n’étaient pas entendues, alors que nous défendions la spécificité de l’agriculture locale, principalement tournée vers l’élevage et constituée de petites structures. »
EHLG naît donc en 2005, avec pour objectif d’offrir une alternative à la chambre d’agriculture officielle jugée plus compatible avec l’agrobusiness. L’idée :défendre l’agriculture paysanne et associer à la décision sur les enjeux agricoles d’autres acteurs que les seuls professionnels du secteur.
Mais un obstacle s’impose bientôt – et pas le moindre : l’État, qui voit là un concurrent illégal à une institution officielle et poursuit l’association, alors même que sa reconnaissance grandit.
Coup de chance pour la structure, son nom basque la protège puisque, selon l’article 2 de la Constitution,
« la langue de la République est le français »! L’État perd donc en première instance ainsi qu’en appel.
Composition pluraliste
La particularité d’EHLG tient à sa composition pluraliste. « Les chambres d’agriculture ont imposé un modèle où seule la profession travaille sur les questions agricoles. Notre projet à nous, c’était de travailler sur l’agriculture paysanne et sur l’alimentation avec les élus et la société civile »,résume Beñat. Ainsi, outre son collège majoritaire constitué de paysans – qu’il rejoint en 2007,avant d’intégrer le bureau de l’association –, le conseil d’administration compte aussi des représentants d’associations environnementales, de défenseurs des consommateurs ou d’agriculteurs retraités…
Alors qu’elle fête cette année ses 20 ans, EHLG « est devenue un acteur territorial incontournable. Les collectivités nous sollicitent pour des diagnostics. Nous sommes consultés lorsque la communauté d’agglomération du Pays basque s’interroge sur l’avenir de l’agriculture. Nous avons gagné la confiance des élus, des paysans et le soutien de la société civile ! »
Une reconnaissance qui se traduit par un soutien concret aux paysans :
« Avec 3 800 fermes dans tout le Pays basque, plus de 2 000 paysans sont passés par notre structure pour des conseils, des formations et du soutien. »
Dans un monde où les territoires ruraux sont souvent perçus comme des réservoirs de ressources pour les villes, EHLG se présente comme un contre-modèle de démocratie locale, où les décisions sont prises par ceux qui vivent et qui travaillent sur le territoire. À l’heure où les crises environnementales et agricoles se multiplient, la démarche de Beñat Molimos et de ses collègues s’affirme comme une bouffée d’air frais dans un système souvent déshumanisé.
“Plus de 2 000 paysans sont passés par notre structure pour des conseils, des formations.”
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