Transports- L’exemple du fiasco juridique de L’A69 donne à réfléchir pour la LGV du GPSO

Agriculture/Environnement Santé-Ecologie
Publié le 24 mai 2025

L’Autoroute A69, serpent de mer juridique – résistance et mobilisation exemplaire des opposants et grands moyens institutionnels pour les porteurs de projet.  Comme sans doute toute la France le sait maintenant, et bien qu’encore non jugé au fond, le dossier d’avancement des travaux de l’A69 a été bloqué: en février, la Justice a annulé l’autorisation environnementale nécessaire à la construction de l’A69 et ordonné la suspension des travaux. L’Etat a fait appel. Les opposants incriminent eux l’Etat, ayant fait avancer les travaux alors que les recours n’étaient pas purgés. A noter que les tensions, tout comme pour le fiasco de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes sont palpables sur place : que l’on en juge par cette action contre « Biotope », accusé de faciliter les grandes infrastructures au détriment de la biodiversité – « Biotope » est impliqué en Occitanie, entre autres dans les projets Contournement Nîmes Montpellier, Ligne Nouvelle Montpellier Perpignan et une « tripotée » de projets d’aménagement urbainArticle Midi Libre, extrait: ML-biotope-200525

Devenue éminemment politique, la saga de ce projet aux travaux avancés sur le terrain malgré les recours, ne laisse pas de surprendre par ses rebonds juridiques: trop d’intérêts financiers et de pouvoir étant en jeu, le Sénat est venu au secours des porteurs, dont Delga à la Région, le constructeur Atosca et l’entrepreneur Fabre pour principal demandeur de cette autoroute. Un vote récent des Sénateurs a surpris: une loi de « validation » est actionnée (C’est un mécanisme législatif visant à protéger, au nom de l’intérêt général, des actes administratifs ou juridiques d’un risque d’annulation par la Justice de jugements non définitifs). Ce vote est critiqué comme ne respectant pas la séparation des pouvoirs (parlementaires / juges)… Un texte peut-être anticonstitutionnel, et qui revient à l’Assemblée nationale le 02/06 avec cette question: le Code de l’Environnement peut-il être détricoté à chaque fois qu’une décision de Justice ne convient pas à des porteurs de projets d’infrastructures destructeurs, fussent-ils des présidents de Région comme Delga ou Rousset? Soutien à l’A69 : le grand malaise au Parti socialiste

Mais quand le pouvoir politique le veut, la Justice peut aller bien plus vite que quand les citoyens le demandent: dernier mais non ultime rebondissement découlant de cette récente pression, le Rapporteur public (l’Etat) vient de recommander à la cour administrative d’appel de Toulouse d’ordonner la reprise du chantier de l’A69, à l’arrêt depuis fin février, et ce deux jours avant le recours par l’Etat contre l’arrêt des travaux. La décision est à suivre. Précisions du 19 maiA69 : avis favorable à la reprise du chantier par le rapporteur public de la cour administrative d’appel de Toulouse

Faire alors le lien avec la LGV du GPSO devient une évidence – un article très intéressant revient sur le mythe du développement et des besoins de la croissance, qui ne sont pas forcément ceux des populations. Il en va de même pour toutes les grandes infrastructures… « L’entêtement des pouvoirs publics à construire l’autoroute A69 traduit une incapacité à remettre en question le modèle de gestion des infrastructures des années 1960 et 1970, estime le chercheur Nelo Magalhães dans cet entretien. » Le CADE a maintes fois démontré, à partir d’études et de rapports sur les bienfaits socio-économiques attendus des LGV, notamment avec des gares excentrées, combien n’est que chimère le prétendu « désenclavement »! Ce dont la population a besoin c’est du plus grand nombre de services de proximité, ce qui s’oppose aux demandes du BTP friand de grandes infrastructures n’ayant rien à voir avec l’irrigation d’un territoire, sur fond de chantage à l’emploi.

En commun pour l’autoroute et le ferroviaire, le dogme libéral européen du libre-échange et de la libre circulation des hommes et des marchandises, synonyme de progrès supposé. En commun également, l’extractivisme que ces deux infrastructures génèrent: sauf à importer, ce sont des carrières, gravières et zones de stockage (sable, gravier, pierres à concasser…) qui s’ouvrent partout pour ces infrastructures, tels des « trous dans un gruyère » de terres agricoles! Car on extrait 350 à 400 millions de tonnes par an, par explosion de roches dures principalement; les gros besoins en matériaux pour l’entretien étant rarement pris en compte par ailleurs lors du montage d’un projet, maintenance dont il s’agit pour les porteurs de projets de minimiser l’impact.

(Sur ce sujet, on peut lire utilement:   A69 : « L’État a tant investi que renoncer lui serait inacceptable ».)

Le plus important juridiquement aujourd’hui, au-delà du coût écologique et financier, est le doute sur la raison impérative d’intérêt public majeur pour l’A69ce qui amène évidemment à comparer avec le GPSO* (*nommé maintenant LNSO par les promoteurs: changer « grand projet » en « lignes nouvelles » est sans doute pour eux une prophétie autoréalisatrice; mais nous gardons GPSO pour ce qui n’est encore, pour nous opposants, qu’un projet!). L’instruction du recours porté par cinq associations devant le Tribunal administratif de Toulouse s’est terminée le 24 /04, et sera suivie d’une audience en juillet probablement pour le jugement au fond (Rappelons que 4 recours sont encore actifs: sur la DUP des AFSB, contre le Plan de financement en QPC, ainsi que sur les autorisations environnementales des AFSB et AFNT).

On imagine bien comment le cas de l’Autoroute Castres/Toulouse peut s’appliquer, et pour les mêmes raisons amplifiées, au GPSO:  l’impact environnemental et sur la biodiversité de la LGV est énorme (Avis du Conseil National pour la Protection de la Nature (CNPN)…une solution alternative existant avec la modernisation possible et en cours de la voie TGV actuelle, la « raison impérative d’intérêt public majeur » de lignes nouvelles s’en trouve encore moins démontrée. Les Amis de la Terre Pyrénées estiment qu’au titre de l’article L 411-2 du Code de l’Environnement, l’arrêt du chantier de LGV s’en trouverait justifié. Le CADE aussi.

Voici une contribution du CADE à la réflexion concernant le parallèle entre l’A69 et la LGV du GPSO (parue en article Mediabask): « Après le coup d’arrêt sur l’A69, l’impact environnemental sera-t-il pris en compte sur la LGV Bordeaux-Toulouse-Dax ? » Arrêt A69 et GPSO

 Enfin, le sort contraire (provisoirement?) à l’A69 encourage nombre d’opposants au GPSO à multiplier les initiatives : du côté Gironde, ce sont les associations qui visent à faire un sanctuaire de la vallée du Ciron, à lui donner un statut juridique permettant de la protéger d’une future LGV Bordeaux/Toulouse; celle-ci pivotant au niveau de Bernos-Beaulac vers Dax, passe ainsi dans le chevelu aquatique et zones humides avec des « ouvrages d’art » qui font frémir les défenseurs de l’environnement (Le triangle de Bernos-Beaulac avec ses multiples viaducs se trouve juste en amont de la hêtraie. Ces aménagements pourraient affecter la température du Ciron et l’hydrologie locale, et ainsi perturber fortement le fonctionnement de la hêtraie* (* forêt primaire la plus ancienne de France). article LGV NON MERCI).

Du côté Garonne, là aussi les associations amies imaginent un statut juridique reposant sur le Droit de l’environnement qui primerait sur les hypothétiques prétentions économiques; une sérieuse épine dans le cuir pourtant peu sensible des Delga/Rousset. Avec une pétition « Protéger les droits du fleuve Garonne », l’association Wild Legal est rejointe par plusieurs associations (la Sepanso par exemple).  LIRE/ article La Dépêche de Toulouse, qui parle…de la LGV en Gironde.

 

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