Enfin un Carton Rouge bien mérité pour ENEDIS et son compteur communicant !

LINKY Santé-Ecologie Ustaritz
Publié le 4 juin 2024

1.       Préambule

La Saga du programme Linky illustre parfaitement le type de développement par lequel les gouvernements successifs essaient de combler leurs incompétences en matière d’imagination économico-industrielle en promouvant des projets dont ils pensent tirer un bénéfice médiatique positif à court terme, mais qui ne correspondent à aucun besoin réel.

1.1   Les LGV

Ainsi, par exemple, nous continuons, de suivre les errements des projets de nouvelles Lignes ferroviaires à Grande Vitesse (LGV) concoctés à partir des prévisions de trafic, voyageur et fret, issues d’évolutions de PIB national et régionaux utopiques, projets supposés rentabiliser les pertes de la SNCF en prenant comme modèle financier, le modèle du Grand Paris Express – ou Grand Puits sans Fond – bâti sur un élargissement de différents taxes locales et régionales, tout ceci, bien sûr, au détriment des lignes du quotidien.

1.2   La cinquième génération de téléphonie mobile : 5G

Nous supportons également les installations de différentes nouvelles générations de téléphonie mobile tous les trois ou quatre ans, aujourd’hui nous en sommes à la 5ème et la 6ème est déjà en test, alors que la Fédération Française des Télécoms nous apprenait dans son étude de 2019 que la rentabilisation de ces investissements était de 32 ans et que l’ANSES, se rendant certainement compte du nombre croissant de personnes électro hypersensibles impactés par ces installations, a engagé des travaux méthodologiques sur la construction de valeurs limites d’exposition significatives dans le domaine des champs électromagnétiques[1], alors que celles imposées[2] aujourd’hui ne sont que les résultats de travaux d’un comité d’experts issus du monde des télécommunications[3], sans tenir compte des nombreuses études scientifiques internationales[4] [5] qui préconisent des moratoires dans ce domaine.

1.3   E-CHO

Puis nous constatons un projet de production de E-méthanol et de biokérosène, aux empreintes carbones réputées innovantes, production issue d’une synthèse biochimique à partir d’hydrogène de biomasses forestière et agricole, la biomasse forestière visée représentant une destruction de puits carbone équivalent à 350.000 tonnes ou 460.000 m3 annuels de forêt, l’hydrogène étant produit dans un électrolyseur d’une puissance inégalée (520 MW), la production de biokérosène prévue ne pouvant couvrir qu’un 1% de la consommation aéronautique mondiale !

1.4  Linky

Indépendamment de ces trois exemples de projet inutiles dont les analyses socio-économiques sont inexistantes ou ont été bâclées, le programme Linky, lui, a échafaudé il y a 10 ans, une Saga, la Saga du projet qui n’avait pas lieu d’être, pour lequel les mensonges ont été empilés dans le seul but de faire d’Enedis une société innovante en matière de gestion de la distribution de l’électricité.

2.       La Saga Linky

Cette Saga a été entamée en 2014 par Enedis, ex-ERDF, filiale d’EDF, après le démantèlement d’EDF entre différents producteurs d’électricité, dont EDF même, le transport de cette électricité aux postes électriques de transformation assuré par RTE et Enedis chargée majoritairement de la distribution de l’électricité auprès des particuliers.

Elle lui a permis d’investir dans un projet de compteur communicant baptisé Linky, en reprenant une idée en vogue il y a fort longtemps en Amérique du Nord (Smart grids), importée en Europe, mais en l’adaptant et en recourant à une technique CPL (Courant Porteur en Ligne) qui transforme, évidemment sans son accord, le réseau électrique privé du consommateur en un réseau électromagnétique, dans le but supposé de déterminer l’empreinte électrique de son habitation et de lui faire profiter d’un grand nombre d’informations pour lui permettre de maîtriser sa consommation électrique.

Ainsi débutait la Saga Linky, financée par le consommateur, avec tout un ensemble de présupposés complètement faux : il suffit pour cela de consulter le rapport d’information du Sénat du 15 décembre 2010 pour se rendre compte du différentiel entre ces présupposés et la réalité à laquelle les consommateurs d’électricité ont eu à se confronter.

2.1   La relève à pied est trop chère, soumise à trop d’erreurs et cause de tricheries

Avant la mise en place de ce compteur réputé intelligent, la consommation électrique d’une habitation était déterminée par une « relève » des index de son compteur, relève d’une part effectuée par des sous-traitants d’Enedis, une à deux fois par an, et, d’autre part, par des relevés « confiance » effectués par les habitants de l’habitation.

Prétextant que cette « relève » lui revenait trop cher, que des erreurs existaient dans ces relevés, Enedis arrivait à convaincre nos gouvernants – ceux cités en début de ce document et dont la compétence a déjà été mentionnée – que le projet Linky allait ouvrir une nouvelle ère de la distribution de l’électricité, pavée de simplicité via des moyens numériques issus de ce compteur communicant.

2.2   Linky, dispositif coûteux pour le consommateur, mais avantageux pour Enedis selon la Cour des Comptes dans son rapport 2018

Dès son annonce le programme Linky (5,67 Md€ 2014) était contesté par la Cour des Comptes, qui, dans son rapport public annuel de février 2018, indiquait que le déploiement de ce compteur représentait « Un dispositif coûteux pour le consommateur, mais avantageux pour Enedis »[6], Enedis ayant bénéficié d’un un prêt intragroupe au taux de 0,77% adossé à un financement de la Banque Européenne d’Investissement (BEI), le reste du financement étant effectué par une adaptation des Tarifs d’Utilisation des Réseaux Publics de transport et de distribution d’électricité(TURPE) sur la facture d’électricité à partir de 2021.

2.3   Un programme déployé par la force et la ruse

Mais le déploiement du programme Linky a entaché la Saga du Linky par les méthodes sauvages auxquelles ont eu recours les sous-traitants d’Enedis pour essayer de convaincre les français du bienfondé du Linky. Les pénétrations abusives dans les propriétés et les immeubles pour installer les Linky sans le consentement des propriétaires, les intimidations et les harcèlements téléphoniques en prétextant le caractère obligatoire du Linky ont soulevé des réactions nationales anti-Linky[7].

Lors de son audition à l’Assemblée nationale en février 2016[8], Monsieur Monloubou Président d’Enedis avait pourtant bien précisé : « obligation nous est faite d’installer de nouveaux compteurs, mais nous n’avons certes pas vocation à forcer la porte de qui que ce soit. Dans la quasi-totalité des cas, aucun refus ne nous est opposé »[9].

Devant les réactions qui ont été rapportées au niveau des Conseils communaux et les compteurs électriques étant propriétés des Communes[10] un certain nombre de communes ont pris des délibérations pour interdire l’installation des Linky[11].

Par exemple le Tribunal Administratif de Rouen le 14 janvier 2019 rejette une requête d’Enedis demandant l’annulation d’une décision du Maire de la Commune de Romilly-sur-Andelle de réglementer le déploiement des compteurs Linky

Certaines de ces délibérations ont été cassées par les Préfets mais des Maires se sont adresser directement à Enedis pour lui demander de respecter le droit de leurs administrés de refuser la pose du compteur.

2.4 Impacts électromagnétiques devant les tribunaux

Pour couronner le mauvais comportement des installateurs, les impacts électromagnétiques générés par les CPL utilisés par ces compteurs aussi bien que par les concentrateurs installés dans les postes de transformation ont donné et continuent à donner à ce programme un goût amer car certains consommateurs ont enregistré des malaises occasionnés par ces impacts électromagnétiques.

2.4.1    Tribunal de Grande Instance de Toulouse

C’est ainsi que le Tribunal de Grande Instance de Toulouse, le mars 2019, enjoint Enedis à n’installer aucun appareil dit Linky dans les domiciles de 13 personnes s’étant plaintes d’hypersensibilité aux champs électromagnétiques et à rétablir une électricité exempte de tout courant porteur[12].

2.4.2    Tribunal de Grande Instance de Foix

Le Tribunal de Grande Instance de Foix, le 25 juin 2019, ordonne à Enedis de n’installer aucun appareil Linky chez trois personnes et d’installer des filtres protégeant des champs électromagnétiques chez deux autres personnes.

2.4.3    Cour d’Appel de Grenoble

La Cour d’appel de Grenoble, le 10 mars 2020, impose à Enedis, compte tenu notamment de l’intolérance d’une personne aux champs électromagnétiques et que le principe de précaution impose de ne pas l’exposer à un risque d’aggravation de son état par l’introduction de nouvelles sources, médicalement contre indiquée, d’installer un compteur électronique classique et de rétablir un courant exempte de tout CPL.

2.4. 4   Cour d’Appel de Bordeaux

C’est également la Cour d’appel de Bordeaux qui, le 17 novembre 2020, a fait injonction à Enedis d’installer des dispositifs de filtre destinés à protéger 19 personnes contre les champs électromagnétiques générés par la bande CPL associée au compteur Linky.

2.4.5    Le Juge des référés du Tribunal judiciaire de Valence

Le Juge des référés du Tribunal judiciaire de Valence a ordonné, le 29 juin 2023, l’enlèvement d’un compteur Linky et son remplacement par un compteur classique, chez une dame de 84 ans, porteuse d’un pacemaker.

Cette liste, donnée à titre d’exemple, n’est certainement pas ni exhaustive ni clôturée.

2.5  Un programme qui ne respecte pas son planning

La Commission de Régulation de l’Energie (CRE), chargée de suivre le déploiement du programme Linky dès son développement en 2014[13], établissait dans son dans son communiqué de décembre 2020[14] que Linky, atout essentiel à la transition énergétique, avec déjà 29,5 millions de compteurs installés par Enedis (4 foyers sur 5) et que son déploiement serait achevé fin 2021.

Mais en février 2022[15], puis en mars 2022[16] la CRE constatant un retard du déploiement du projet (90% installé) qui devait être terminé en fin 2021, et Enedis imputant ce retard aux consommateurs persistant à refuser la pose du Linky, établissait une période de « déploiement diffus » durant laquelle « des surcoûts engendrés par ce dépassement de planning » devraient être supportés par ces consommateurs.

La CRE établissait donc clairement que seuls les consommateurs, non équipés d’un compteur Linky et n’ayant pas mis à la disposition d’Enedis leurs index de consommation durant une année à compter du 1er janvier 2022 seraient contraints de payer 8,30€ tous les 2 mois.

C’est ainsi que depuis 2022 les consommateurs « rémanents » sont obligés d’ouvrir un compte sur le site d’Enedis et de donner régulièrement leurs index de consommation afin d’éviter de payer 8,30 € tous les 2 mois. Cela n’empêche pas les représentants d’Enedis de traquer, téléphoniquement ou directement, les consommateurs « rémanents » en leur promettant des taxes supplémentaires.

2.6   Ce qui est encore caché aux consommateurs, aux Députés et Sénateurs

2.6.1.    KVA au lieu de KW

Dès les premières installations de Linky il était évident que ce compteur enregistrait, en matière d’index des nombres de KVA consommés alors que les précédents compteurs, électronique en particulier, enregistraient des KW consommés.

Il suffit de demander à n’importe quel électricien la différence pour qu’il confirme que le nombre de KVA est toujours supérieur au nombre de KW[17].

Ainsi une consommation décrétée par Linky est toujours supérieure à celle enregistrée par un compteur classique.

Le déploiement du programme Linky représente une usurpation de la notion du service public de l’électricité en modifiant d’une manière unilatérale la convention initiale de facturation de ce service en KWh.

La facturation de notre consommation électrique par les fournisseurs d’énergie électrique, en particulier par EDF, mentionne les relevés, début et fin, établis par Linky, la consommation indiquée en KWh – est en fait un nombre de KVAs comme indiqué plus haut – avec le prix de facturation du KWh. La facture est donc la facture d’un nombre de KVAs facturés au prix du KWh !

2.6.2.    Linky non mentionné dans les textes de loi

La référence à la dénomination Linky n’est pas utilisée dans les textes de lois.

Le Code de l’énergie fait allusion à « un dispositif de comptage », la loi 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte fait allusion à un « système de comptage », le Rapport d’information de l’Assemblée nationale d’octobre 2016 sur l’application de cette loi fait référence dans son article 28 aux compteurs déportés Linky et Gazpar.

Seule la CRE, chargée de suivre l’évolution de ce programme et du respect de leurs planning et coûts mentionne le programme Linky.

Mais la différence en un « un dispositif de comptage » et un Linky qui inonde l’habitation de champs électromagnétiques en lui facturant des KVAs distribués au lieu des KWh consommés est ignorée par nos gouvernants.

2.7  Le réel bénéfice escompté du programme Linky

En fait le bénéfice escompté de ce programme était dans la simplicité effective pour Enedis de mieux connaitre le réseau dont elle était devenue gestionnaire pour identifier les pannes et incidents et déterminer des bilans de consommation par zone géographique.

Mais ce bénéfice allait également résider dans la possibilité pour Enedis de disposer d’informations qui caractériseraient les profils des consommateurs d’électricité, informations qui allaient intéresser les différents fournisseurs d’électricité pour leur permettre de promouvoir auprès des consommateurs des contrats « plus adaptés à leurs besoins ».

En fait ce bénéfice espéré allait se traduire par des appels téléphoniques des différents fournisseurs d’électricité auprès des consommateurs pour leur proposer des contrats plus « avantageux », c’est-à-dire le temps d’une modification du prix de l’énergie décrété par la bourse européenne de l’énergie[18] [19] !

En liaison avec les fournisseurs et opérateurs d’électricité Enedis allait également pouvoir pratiquer des effacements[20] pour permettre, en commandant à distance, l’arrêt de certains appareils, de réduire la demande lorsque cela pouvait être nécessaire, ou réclamée ou imposée[21], voire d’interrompre la distribution de l’électricité.

Bref, grâce à ce Linky et en surfant également sur la vague européenne qui transformait la disponibilité de l’électricité pour tous en tant que bien public modernisé[22] en un service « public »[23], géré par le Code de l’énergie[24], Enedis allait faciliter l’établissement, la gestion et l’évolution d’une taxe d’utilisation des réseaux publics d’électricité (TURPE), incluse dans les factures d’électricité du consommateur.

2.7   Carton rouge du Médiateur de l’Energie

Pour concrétiser le succès de la Saga Linky il faut consulter le rapport d’activité 2023 du Médiateur National de l’Energie[25] pour constater que M. Chalan Belval y décerne trois Cartons Rouges dont un Carton Rouge à Enedis :

« Enfin, j’attribue à regret le troisième carton rouge au gestionnaire de réseau de distribution ENEDIS, non seulement pour des litiges dans lesquels les demandes des consommateurs d’électricité sont mal traitées, mais aussi, et surtout, pour une forte dégradation des conditions d’instruction des litiges dont je suis saisi en médiation et du suivi de mes recommandations. ENEDIS est pourtant une grande entreprise de service public, techniquement performante et innovante. Elle n’est malheureusement pas encore parvenue à se transformer culturellement pour traiter ses usagers comme de véritables clients.

Au-delà des difficultés rencontrées en médiation, le médiateur national de l’énergie a observé des pratiques particulièrement critiquables de la part d’ENEDIS :

  • ENEDIS est le seul opérateur qui refuse obstinément d’appliquer les dispositions de l’article L. 224-11 du code de la consommation en cas d’émission tardive d’un redressement de consommation. ……

  • Un certain nombre de mises en service d’un contrat de fourniture se sont trouvées retardées, par la faute d’ENEDIS qui avait omis de faire la mise en service du fait qu’il n’avait pas pu effectuer simultanément la pose d’un compteur Linky. Cette pratique, qui ne respecte pas les droits des consommateurs, a entraîné pour eux de la consommation sans fournisseur, dont le prix est beaucoup plus élevé que si le contrat avait été activé à la date demandée par le consommateur….

  • Lorsque ENEDIS accepte en médiation de verser un dédommagement dans le cas d’une situation de consommation sans fournisseur, il refuse en revanche d’en déduire le montant sur les factures qu’il émet ; il invoque des règles comptables et le fait que le faible nombre de cas en cause ne justifie pas une évolution coûteuse de son système d’information……

2.8  Conclusion sur la Saga Linky

Il est clair que ce programme a été lancé sans aucune étude socio-économique[26], et a été vendu pour éviter le « coût exorbitant » de la relève à pied, mais il serait intéressant d’en avoir une estimation.

Il a consisté à implanter, dans des conditions que même le Médiateur de l’Energie déplore, des compteurs Linky dont le développement est entièrement financé par les consommateurs (TURPE) et pour lesquels les textes législatifs n’osent pas référencer le nom, certainement pour se prémunir des impacts secondaires que révèlent certaines juridictions.

3.       Conclusion générale

Quand verrons-nous les cartons rouges pour tous les autres programmes cités en début de ce document ?

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